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Le Muscadet est-il patient?
Vendredi du vin #63 : éloge de la patience
Les trois définitions du mot patience dans le Larousse :
1 – Aptitude à supporter avec constance ou résignation les maux, les désagréments, de l’existence.
2 – Qualité de quelqu’un qui peut attendre longtemps sans irritation ni lassitude.
3 – Capacité à persévérer, esprit de suite, constance de l’effort.
Le Muscadet est-il patient ?
D’abord, le Muscadet existe-t-il ? Tous les vins de France ont une appellation géographique. On dit : » Je vais voir un vigneron ou une vigneronne à Saumur, en Alsace, en Bourgogne » mais on ne dit pas : « Je vais en Muscadet« . Où est le Muscadet ? C’est près de Nantes mais on dit : « J’ai acheté du Bordeaux » et non : « J’ai acheté du Nantes. » Même son nom est mystérieux. Muscadet parce qu’il serait un vin musqué. Il ne porte même pas le nom de son cépage, le Melon de Bourgogne. Alors, en mal aimé, il est devenu un vin de l’impatience. Rapidement vinifié, frais mais relativement acide, il est devenu un vin de comptoir dans les cafés parisiens ou les bars nantais ; bu vite fait sur le zinc , au retour du travail dans les usines, conserveries, chantiers navals de Nantes ou de St Nazaire. Et puis, Nantes, c’est près de la mer ; alors, on l’a associé aux huitres ; son acidité (et encore plus celle du Gros Plant, son collègue nantais) supporte le sel et l’iode du fruit de mer. Dans les restaurants, on le méprise aussi ; on n’en trouve souvent qu’une référence parce qu’il serait un vin uniforme alors que la liste des Bourgogne blancs est pléthorique. Mal aimé, on l’aime mal.
Alors, des vignerons et vigneronnes ont eu de la patience. Ils ont persévéré, recherché et trouvé que ce vin pouvait supporter un séjour en fûts de chêne, que la fermentation sur ses lies n’était pas un passage obligé, qu’il dégageait des saveurs différentes selon les particularités géologiques et… qu’il pouvait bonifier en vieillissant. Certains se sont lancés dans la culture bio voire en biodynamie.
Alors, ils ont réalisé des cuvées : Muscadet de granite, de gabbro, de gneiss, d’orthogneiss, d’amphibolite. Ce sont les Bossard-Niger Van Herck (Le Landreau), Landron (La Haye Fouassière), Maillard (Le Pallet), Caillé (Monnières) Brégeon (Gorges) et d’autres qui se sont attelés à la tâche pour donner de la finesse, de la délicatesse, de la minéralité, de la complexité à leurs cuvées.
Ils se sont parfois constitués en crus communaux pour affirmer leur originalité : Clisson, Gorges, Monnières-St Fiacre bientôt Le Pallet. Et puisqu’on le méprise parfois en France, ils sont allés le faire découvrir Outre-Atlantique, là où il n’y a pas d’a priori. Il se retrouve ainsi sur les grandes tables de New-York et Parker s’y intéresse. On raconte même que Mr Brégeon l’a mis en concurrence à l’aveugle avec des Montrachet. Christophe Maillard en a bluffé plus d’un avec son Emprunte futée. Certaines cuvées osent côtoyer une volaille en sauce et même quelques fromages.
Alors, la patience?
Non au sens 1 : Les vignerons du Muscadet ne se résignent pas.
Oui au sens 2 : Le Muscadet, si le vigneron le souhaite, peut attendre et bonifier.
Oui au sens 3 : Des vignerons nantais ont persévéré pour une belle réussite.
Le Muscadet n’est plus seulement le vin de mes vacances comme le vantait une ancienne affiche.
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